Notre confrère Benjamin Téoule du média le d’Oc revenait récemment sur le désarroi de la famille de Godefroid Djinekou, dont l’enquête sur le décès suite à une intervention policière à Béziers, a été classée par le Parquet le 3 février dernier, malgré des éléments troubles sur lesquels revient le d’Oc. Les modalités d’intervention des policiers de la BAC posent en effet question, dans la mesure où ceux-ci faisaient face à une personne souffrant de troubles psychiques et visiblement en pleine crise clastique.
“Fragile psychologiquement, Godefroid fait régulièrement des crises clastiques – où la violence est dirigée vers des objets et du mobilier, perçus comme des obstacles. [Sa soeur] appelle la police comme il le lui a demandé. Alertés par les cris et le fracas, des voisins préviennent aussi le commissariat. Entretemps, il est descendu dans la rue, et y déambule en criant juste vêtu d’un caleçon.”
Le témoignage d’une personne qui assiste ensuite à son interpellation décrit Godefroid Djinekou dans un état très perturbé lié à la prise de produits stupéfiants, mais pas agressif : “Je me suis approché de lui pour essayer de le calmer mais il était craintif.” Selon le frère du jeune homme : “quand il avait une crise clastique, en général, il en avait pris [de la cocaïne]. Mais il n’était pas menaçant, jamais. Et ce jour-là, il était en détresse et avait besoin d’aide.”
Des agents de la BAC arrivent alors et semble-t-il, mettent le feu au poudre, en gazant depuis leur véhicule le jeune homme, qui pris de panique, se met à courir dans tous les sens et à crier “ils vont me tuer!”. “Cette intervention ressemble de moins en moins à un différend familial et de plus en plus à une personne ayant un trouble de la personnalité ou ayant pris un produit psychotrope” note un autre policier dont les propos sont rapportés par le d’Oc.
Le témoin rapporte alors l’interpellation qui se déroule : “Ils ont voulu l’arrêter et l’ont plaqué au sol à deux, raconte D. Ensuite ils se sont mis à trois dessus. Il était ventre au sol, avec une clef de bras et un genou sur la colonne vertébrale, immobilisé de tous les côtés. […] Après 3 ou 4 minutes, l’un d’entre eux a dit : “Ah, beh, il ne respire plus…” Ils lui ont vidé une bouteille d’eau sur la tête et lui ont balancé 4 ou 5 bonnes baffes. Ayant suivi des formations de pompiers, plus jeune, j’ai proposé de faire un massage cardiaque. Ils ont refusé.”
Une expertise médico-légale vient déterminer plusieurs causes concordantes dans la mort de Godefroid Djinekou : un état préalable d’insuffisance coronarienne, l’intoxication à la cocaïne, la contention physique prolongée au sol en décubitus ventral (le plaquage des policiers), et l’exposition à du gaz lacrymogène.
Carences sociétales et policières
Cette affaire biterroise résonne tragiquement avec celle plus récente, de Mohamed Gabsi, décédé le 8 avril 2020 suite à une intervention de policiers municipaux, pour non respect du couvre-feu lors du confinement à Béziers. Face à l’état agité de l’homme, les policiers appellent du renfort avant de l’interpeller brutalement et de le porter dans leur véhicule. Les mots de Mohamed Gabsi résonnent : “S’il vous plaît, je ne peux plus respirer. Ils veulent me tuer !”
Le rapport d’autopsie confirme que l’intervention policière a fort à voir dans la mort de Mohamed : « fracture de la corne thyroïdienne », « contusion du nerf vague », « syndrome asphyxique ». Le parquet quant à lui préfère mettre l’accent sur la prise de cocaïne pour expliquer ce décès, tout comme le maire de Béziers Robert Ménard : “Ce garçon, qui avait souvent affaire à la police, il était tellement chargé en cocaïne que les doses pouvaient être létales. C’est une des hypothèses.” Réflexe écoeurant et abondamment relayé par la presse régionale, qui décrit avant toute chose Mohamed Gabsi comme un drogué et un SDF (ce qui était par ailleurs faux), et dont avait aussi été victime Godefroid Djinekou.
Mohamed Gabsi n’avait aucun antécédent cardiaque, mais souffrait en revanche de troubles schizophréniques détectés lors de son adolescence. Il avait également un certain passif avec la police municipale de Béziers puisque celle-ci l’avait déjà envoyé aux urgences un mois plus tôt, quand victime d’une crise d’angoisse, des agents l’avaient plaqué au sol et interpellé, provoquant un arrêt cardio-respiratoire de trois minutes. Les policiers ne pouvaient pas ne pas être au courant de la condition médicale de Mohamed.
Récemment, à Saint-Denis, c’est un jeune homme déficient mental qui a été violenté par des agents de police. “À proximité du bâtiment 10, où il habite, le jeune homme de 25 ans, déficient mental est plaqué au sol. Il hurle de douleur. Trois policiers en civil le soulèvent et le portent difficilement jusqu’à leur voiture banalisée.” Alors que des voisins qui assistent à la scène préviennent les policiers de la condition du jeune homme, “les policiers de la Brigade anti-criminalité (BAC) – au moins six agents sur les images – ne veulent rien entendre. « Quand il courait, il n’était pas handicapé », répond un agent, selon plusieurs témoignages. La police aurait suspecté Amine de transporter de la drogue..”
Le soir de son interpellation, Amine était simplement parti acheter de la nourriture de l’autre côté du quartier au niveau de la Poste, raconte son père. Le jeune homme était revenu à la maison en courant, comme il en a l’habitude. « Tout le temps, il court. Il est connu pour ça », raconte Nour. Si son handicap ne se voit pas, il suffit de lui parler pour s’en rendre compte, rajoute Kadi, une mère de Franc-Moisin. « Il a un comportement d’enfant », dit-elle. « Tout le monde connait Amine. Il a grandi ici. Il n’a jamais fait de mal à personne. C’est un gentil garçon. Il rend service aux gens », souligne son père.
Selon le Pr. Senon du CHU de Poitiers, interrogé par Franceinfo, dans le cadre d’une enquête sur la violence des malades schizophrènes ou bipolaires : “Les passages à l’acte violent des malades mentaux sont l’exception et on sait très bien qu’ils sont en revanche beaucoup plus souvent victimes: ils sont 7 à 17 fois plus fréquemment victimes de violences que la population générale.” Toutefois, la précarisation, les difficultés d’insertion sociale, l’isolement ainsi que l’abus ou la dépendance à l’alcool ou à d’autres substances psycho-actives, l’âge (moins de 40 ans), une rupture des soins font partie des facteurs de risque, comme l’explique Franceinfo. Les carences sociétales quant à la prise en charge des profils psychiatriques viennent donc largement contribuer au fait que de telles crises puissent intervenir dans l’espace public.
Comment est-il possible, et justifiable aux yeux des pouvoirs publics, que des équipes de policiers en surnombre par rapport à des individus isolés et en crise de panique, ne soient pas capables de prendre en charge la situation sans aboutir sur de graves blessures ou un décès ? C’est pourtant un cas récurrent en France, qui met peut-être le doigt sur un manque de formation des agents de police quant aux profils psychiatriques, autistes ou de handicaps mentaux, et sur un manque d’encadrement quant aux techniques utilisées.
Quand les balles répondent aux couteaux
Le 3 décembre 2015, à Rennes, Babacar Gueye, 27 ans, sans-papiers arrivé récemment en France, est tué de plusieurs balles dans le dos par des agents de police intervenus à son domicile. Le jeune homme était lui aussi en pleine crise de panique et se mutilait l’abdomen à l’aide d’un petit couteau de cuisine. C’est ce couteau que les huit policiers prétextent pour légitime défense, après que le jeune homme qui ne comprenait pas bien le français et craignait, comme toute personne sans-papiers, une intervention policière, n’ait pas réagi aux sommations d’usage. Il a reçu cinq balles dans le corps, dont deux mortelles, avant d’être menotté et laissé agonisant de longues minutes dans sa cage d’escalier.
Encore une fois, c’est la stigmatisation de la victime qui prévaut dans ce genre de cas. Après son décès, les policiers portent plainte pour tentative de meurtre contre le jeune homme, décrit comme “un forcené“. Comme souvent dans ce genre de cas, c’est le terme qui revient régulièrement dans les lignes de la presse régionale, qui reprend les versions préfectorales sans trop se soucier de celles des victimes, et qui témoigne des relents psychophobes et de l’incompréhension de la société. Mais une personne qui est en train de se mutiler à l’aide d’un petit couteau de cuisine représente-t-elle vraiment un danger pour une huitaine de policiers armés plus que pour elle-même ?
Autre cas d’une mort par balles, celle de Abdoulaye Camara au Havre en 2014, qui visiblement en crise psychotique avait reçu dix projectiles dans le corps alors qu’il agressait un passant à l’aide d’un couteau. Les policiers ont été considérés comme en état de légitime défense et innocentés par la justice.
Deux ans plus tard, un homme est tué en septembre 2016 à Vincennes, sous les balles des policiers. Le Parisien relate les faits : “Vers 11 heures, les deux infirmières qui viennent donner son traitement à cet homme de 29 ans se heurtent à son refus. Appelés en renfort, les équipages de police de Vincennes et de Fontenay le trouvent retranché dans une pièce, un couteau de cuisine de 30 cm de long en sa possession. Quand la police lui intime l’ordre de sortir, l’homme finit par le faire, mais il fonce alors vers une policière, brigadier-chef de Vincennes et lui donne un coup de couteau à la nuque. Devant cet accès de violence soudain, la policière agressée et l’un de ses collègues tirent sur lui. Malgré les premiers soins prodigués, il décède peu après. La policière blessée est évacuée par les pompiers à l’hôpital Bégin. Sa plaie ne semble pas grave, mais elle est, de l’aveu de ses collègues sur place, « extrêmement choquée. »” Le site Paris-Luttes relaie un avis critique d’une commission composée de personnels médicaux :
Nous sommes touché-e-s en plein cœur lorsque nous apprenons qu’un patient à été tué par la police, un «malade psychiatrique». Et parce qu’il était «malade psychiatrique», nous savons ô combien il devait se trouver dans une grande souffrance, pris par ses angoisses, et dans une colère extrême face à cette intrusion dans son domicile.
Dans une autre affaire survenue à Auxerre en janvier 2017, Cyrille Faussadier, jeune homme aux antécédents psychiatriques connus, est tué chez lui par des policiers après avoir reçu un tir de flashball et du gaz lacrymogène, alors qu’il les menaçait avec une barre d’haltères. Les policiers l’ont ensuite plaqué au sol et ont constaté qu’il faisait une crise cardiaque. Pour le collectif Désarmons-les qui a documenté l’affaire, encore une fois, c’est le terme de “forcené” abondamment repris dans la presse, qui vient justifier l’intervention policière, niant le caractère de vulnérabilité des profils psychiatriques.
Asphyxie mécanique et abandon médical
Lorsqu’elle ne se sert pas de ses armes, c’est par ses techniques d’immobilisation que la police tue, comme dans le cadre de Mohamed Gabsi ou de Godefroid Djinekou. Les exemples sont malheureusement bien plus nombreux du mauvais usage de ces techniques telles que la clé d’étranglement ou le plaquage ventral, et à plus forte raison dans des situations tendues impliquant des personnes aux profils psychiatriques ou en pleine crise psychotique parfois dues à l’ingestion de psychotropes.
La France a dès 2007 été condamnée par la Cour européenne des Droits de l’Homme, dans le cadre de l’affaire Mohamed Saoud, un jeune homme schizophrène qui n’a pas survécu à son interpellation par les policiers en novembre 1998 à Toulon. La Cour, si elle avait estimé (comme le Parquet dans le cadre de l’affaire Djinekou) que l’arrestation d’une personne souffrant de troubles mentaux avait été violente, l’attitude des policiers était “proportionnée au comportement de l’intéressé.” Toutefois, c’est l’absence de soins médicaux ni même d’attention pour la personne arrêtée qui avait été pointée du doigt par l’Institution, les autorités ayant une obligation de protection de la santé des personnes interpellées. Mohamed Saoud, laissé sans soin, était rapidement décédé.
Encore une fois, les carences de l’État français viennent créer un préalable qui aboutit sur l’intervention policière causant la mort. Une semaine avant les faits, Mohamed Saoud avait souhaité être hospitalisé dans une clinique où il avait précédemment été soigné pour dépression. Le jeune homme de 26 ans souffrait lui aussi de schizophrénie avec un taux d’incapacité de 80%. Appelés par sa famille en raison d’une crise très violente, les services de police de Toulon étaient intervenus, informés par sa soeur des particularités médicales de Mohamed Saoud.
Les policiers s’introduisirent par le balcon de l’appartement. Lors de l’assaut, Mohamed Saoud parvint à asséner plusieurs coups de barre de fer aux officiers, et à s’emparer d’un revolver et tirer quatre coups de feu au ras du sol. Les premiers policiers, blessés, furent remplacés par leurs collègues qui, ne parvenant pas à menotter Mohamed Saoud dans le dos, le menottèrent les bras en avant, le maintenant plaqué au sol sur le ventre par la pression de leur poids. Deux policiers le maintinrent aux poignets et aux chevilles, et un autre plaça ses bras tendus sur les épaules du jeune homme ainsi que son genou sur les reins.
A leur arrivée, les sapeurs pompiers dispensèrent les premiers soins aux policiers blessés, attendant, au vu de la vigueur encore témoignée par Mohamed Saoud, l’intervention du Service d’aide médicale urgente (SAMU) pour lui administrer un calmant. Peu après, le jeune homme présenta un affaiblissement, qui se révéla être un arrêt cardio-respiratoire, puis décéda. Une autopsie du corps de Mohamed Saoud ainsi que d’autres examens révélèrent la présence d’indices évoquant la possibilité d’une « asphyxie lente de type mécanique ».
Le cas de Mohamed Saoud, pris dans une crise de folie dangereuse pour lui-même, comme pour ses proches et les policiers, démontre une intervention policière qui a été proportionnée jusqu’à son arrestation. C’est la suite de celle-ci qui est reprochée par la CEDH : entravé aux mains et aux pieds, Mohamed Saoud ne présentait plus aucun danger, mais les policiers ont continué leur étreinte pendant 35 minutes, entrainant l’asphyxie du jeune homme, tandis qu’aucun examen médical, même superficiel, n’était pratiqué pour s’assurer de son état de santé.
C’est d’ailleurs souvent cette question de la prise en charge a posteriori de l’arrestation qui revient, comme dans le cas de Babacar Gueye. Ce fut aussi le cas pour un homme sur le cas duquel a statué le Défenseur des Droits, à rebours des décisions de justice ayant innocenté les policiers responsables de sa mort. Appelés au sujet d’un désaccord entre la victime, atteinte de troubles psychiatriques, et sa pharmacie, les policiers entraînent le jeune homme à l’extérieur de l’officine et face à son état agité, lui auraient asséné deux coups de poing dans les abdominaux avant de le maintenir au sol du fourgon, “l’un l’ayant maintenu par les épaules et les deux autres s’étaient mis debout au niveau de ses fesses et ses mollets“.
[Le défenseur des droits] a considéré que les gestes de maintien et de compression pratiqués dans le fourgon étaient dangereux et disproportionnés et qu’ils étaient constitutifs d’une grave atteinte à la dignité humaine et d’un traitement inhumain et dégradant au sens de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le Défenseur a noté des contradictions entre les déclarations des policiers sur l’existence de violences physiques autres que les deux coups de poing de diversion et a indiqué qu’aucun témoin n’avait assisté à l’intégralité de la scène. Il a recommandé le renforcement de la formation initiale et continue des fonctionnaires de police quant à la prise en charge des personnes atteintes de troubles mentaux.
En 2011, Serge Partouche, un homme autiste de 49 ans, perd la vie à Marseille d’un arrêt cardio-respiratoire à la suite d’une intervention d’un équipage de police secours. “L’expertise évoque la combinaison d’un étranglement par une clé de cou ayant provoqué la fracture des cartilages du larynx et d’une asphyxie consécutive au maintien au sol sur le ventre durant une dizaine de minutes avec compression thoracique.” Par ses parents, comme par ses voisins, Serge Partouche est unanimement décrit comme “un enfant” dans un corps de Golgoth, il est notamment connu pour “arracher les feuilles des arbres, triturer les poignées des portails, rentrer chez les gens pour fouiller leurs frigos“. « Il était de nature assez peureuse, il suffisait de lui dire : “Tu sors Serge” et il sortait sans problème », a témoigné un voisin durant l’enquête comme le rapporte le Monde.
Alertés par une voisine, les agents interviennent très difficilement face à Serge Partouche qui se débat. Une clé d’étranglement mal effectuée est directement responsable d’une fracture du larynx, avant que l’homme ne soit plaqué au sol sous la pression de trois policiers, au niveau des épaules, du bassin et des chevilles. Serge Partouche se débat pendant environ dix minutes sous cette triple pression.
Le film radio montre que l’équipage a pourtant été informé rapidement de sa maladie : « Vous envoyez les pompiers car le gars, c’est un autiste. Il comprend rien à ce qu’on lui dit. » Selon les experts, un maintien au sol face contre terre est fatal au bout de neuf minutes. « Vous avez entendu parler de l’asphyxie positionnelle ? », questionne le président du tribunal, Fabrice Castoldi. « Pas du tout, on nous l’apprend à l’école, mais sans rentrer dans les détails. »
La fiche FT 11 relative aux techniques et instructions en vigueur dans la police nationale concernant le menottage souligne en caractères gras que « rapidement, afin d’éviter les risques d’asphyxie posturale, la personne menottée doit être mise en position d’attente (latérale ou assise) ». Mais les prévenus ne sont pas destinataires de cette fiche et « cela c’est sidérant » observe Me Pierre Caviglioli, l’un des défenseurs des policiers. Le procureur Vandermaesen est, lui, « abasourdi de constater qu’on n’apprenne à aucun d’entre vous que ce type de geste peut avoir de telles conséquences. C’est une responsabilité de service qui vous dépasse mais ne vous exonère pas ».
En mars 2015, c’est Amadou Koumé qui perd la vie à Saint-Quentin après une intervention massive de la police. Le jeune homme qui passe sa soirée dans un bar, fait une crise d’angoisse suite à la prise de cocaïne. Il tient des propos largement incohérents lorsque plusieurs policiers, alertés par le gérant du bar, se portent à sa hauteur. “Au total 16 fonctionnaires se relayent pour maîtriser Amadou Koumé et utilisent à plusieurs reprises la technique de l’étranglement.” Amadou Koumé décède au commissariat d’un oedème pulmonaire suite à « l’association d’une asphyxie mécanique par traumatisme cervical et laryngé et d’une intoxication à la cocaïne ». Après cinq ans d’instruction, trois fonctionnaires de police ont été mis en examen “pour violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner”, dix d’entre eux font l’objet d’une plainte de la famille pour non-assistance à personne en danger.
Entre négligence coupable et manque de formation
La plupart des cas compilés dans cet article, s’ils ne démontrent pas forcément d’intentionnalité de la part des policiers quant aux profils psychiatriques, montrent en revanche un double problème relatif à l’institution police. D’une part, on constate un manque de formation criant quant à la prise en charge de profils potentiellement dangereux, où l’on va recourir à un usage de la force parfois disproportionné quant à la menace représentée. D’autre part, comme dans de nombreux cas de violences policières entraînant des décès lors d’interpellations, c’est souvent l’usage brutal des techniques d’immobilisation et surtout, la mauvaise ou non prise en charge médicale suite à ces interpellations violentes, qui vient provoquer la mort a posteriori de la personne interpellée, ce qui cette fois vient soulever la question des comportements personnels des agents impliqués. Et donc celle d’un encadrement qui permettrait une forme de sentiment d’impunité.
En outre, il revient de relever l’origine étrangère récurrente des personnes aux problèmes psychiatriques ayant perdu la vie suite à une intervention de la police, comme dans le cas des personnes dites saines d’esprit. Ce genre de situation vient ainsi presque toujours se produire sur des personnes précarisées par leur condition, et dans les articles de la presse ce sont des profils issus de l’immigration qui reviennent le plus. La police serait-elle plus psychophobe à l’égard de ces personnes ?
De manière préoccupante, et comme presque systématiquement dans le cas des violences policières entraînant la mort, la presse régionale comme le Parquet se positionnent dans une démarche de stigmatisation de la victime, soit autour de la consommation de drogues, soit de la situation marginale de la personne, soit même de sa condition médicale qui se verra alors niée dans sa vulnérabilité sous l’usage d’images stéréotypantes telles que celle du “forcené” ou du “déséquilibré”, face auquel aucun autre moyen que celui de la mise à mort ne serait capable d’être efficace.
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