Protocole sanitaire : les profs du lycée Mendès France exercent leur droit de retrait à Montpellier

Alors que l’épidémie de Covid19 bat à nouveau son plein et entame une retentissante deuxième vague, une cinquantaine de professeurs et personnels du lycée Pierre Mendès France à Montpellier s’est mise en grève hier mardi 3 novembre, pour dénoncer le non respect des nouvelles exigences du protocole sanitaire renforcé.

Les enseignants et personnels du lycée ont constaté dès la rentrée ce lundi un “manque de matériel sanitaire dans les salles de classe et les sanitaires (savons, gels, essuie-mains…), le non nettoyage quotidien des locaux, des classes aux effectifs importants dans des salles inadaptées, des gestes barrières très difficiles à appliquer” et notamment dans des cantines surchargées. Le manque de personnel d’encadrement et d’entretien est également mis en avant par la communauté éducative, qui s’alarme par ailleurs que deux semaines après l’assassinat de Samuel Paty, le protocole Vigipirate ne soit visiblement pas respecté puisque l’établissement demeure en accès libre.

Les personnels mobilisés ont ainsi sollicité leur direction ce lundi 2 novembre 2020, en proposant de réfléchir à la mise en place de mesures adaptées : réduction du nombre d’élèves par classe, cours en distanciel alterné, moyens humains et matériels supplémentaires et notamment sur le plan sanitaire, distribution de masques pour les enseignants. Mais aussi une meilleure information sur le nombre de cas positifs et la présence de l’épidémie au sein de l’établissement.

La direction ayant reçu une délégation composée d’enseignants et d’agents, a cependant, par la voix du proviseur M. Grellet, renvoyé “chacun à une prise de responsabilité individuelle nous contraignant à exercer notre travail d’enseignants dans des conditions inchangées et inacceptables en l’état” pour les personnels en grève. “Aucun temps de concertation, ni de préparation ne nous a donc été accordé, nous obligeant, pour protéger l’ensemble des élèves, des parents et des personnels du lycée, à exercer notre droit de retrait.

Ce mouvement de grève est assez important puisqu’il concernerait plus d’un tiers des professeurs de l’établissement.

Vers un protocole personnalisé à partir de la semaine prochaine

Ce mercredi 4 novembre se tenait finalement un conseil pédagogique réunissant personnels et direction de l’établissement, lequel s’orienterait vers la mise en place d’un accueil alterné pour limiter l’affluence dans ce lycée accueillant près de 1600 élèves. La moitié de ceux-ci suivraient ainsi les cours pendant une semaine, avant de rester la suivante à leur domicile, avec du travail à faire. “On est plutôt content car c’est ce qu’on demandait” témoigne Souria Meziani, professeure de Lettres-Histoire.

Cependant, celle-ci regrette que l’application de ce protocole ne se fasse qu’à partir du 9 novembre, une semaine après la rentrée. Ainsi, la reprise se sera déroulée dans les mêmes conditions qu’avant les vacances, les mesures sanitaires étant limitées au port du masque, au respect tant bien que mal des distanciations sociales, et à l’usage régulier de gel hydroalcoolique.

Les élèves nous interpellent sur le fait qu’ils soient trop nombreux dans les classes, dans les couloirs, et beaucoup trop nombreux à la cantine. Le mouvement de grève est plutôt bien reçu, même si cela peut être compliqué pour les familles comme dans les situations de grève classiques, mais avec un public âgé de 15 à 20 ans, on n’a pas le problème de la garde à domicile.

File d’attente devant la cantine du lycée Pierre Mendès France

Les personnels sur le carreau

Sur la question des masques, Souria Meziani s’indigne des mesures prises à l’égard du personnel éducatif : “On a reçu deux masques en tissu au mois de septembre. Depuis, plus aucun. On nous dit pourtant qu’ils sont arrivés à la rentrée, c’était lundi, on est mercredi et on n’a toujours pas de masques. On a balancé ceux distribués en septembre car ils étaient toxiques. Tous les personnels viennent donc masqués à leurs frais.” Une situation qui contraste avec celle des établissements privés, qui sont dans l’obligation de protéger leurs salarié·es. C’est aussi normalement le cas de l’Éducation nationale, où l’obligation n’est visiblement pas respectée ni prise au sérieux.

Pour l’heure, les personnels ont pour la plupart poursuivi leur mouvement de grève : “Aujourd’hui on était un certain nombre à être en retrait. Mais pas mal de collègues ont entamé des démarches médicales afin de pouvoir se protéger et rester à domicile. Cela reste des démarches individuelles.

Bien que la motion revendicative d’hier ait été signée assez largement, au delà des enseignants grévistes, par le reste des personnels de l’établissement, ceux-ci n’ont cependant pas forcément pu se mettre en grève : “Les agents techniques sont très sollicités et débrayent peu. Les surveillants sont dans des situations souvent très précaires, avec des paies assez minimes, ce qui rend compliqué de se mettre en grève.

Demain, les personnels se réuniront à nouveau pour envisager plusieurs hypothèses : “Soit on continue un grève collective, sachant que ce sera le quatrième jour et que cela se ressent sur les payes, soit nous n’assurerons à partir de demain que les heures de classe en groupes et exercerons notre droit de retrait sur les heures de classe entière.” Une sorte de grève perlée adaptée à la situation exceptionnelle de l’épidémie.







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