4 ans et demi de prison ferme pour l’agresseur des 4 colleuses féministes à Montpellier

Le verdict était attendu de pied ferme par les victimes, leurs familles et les militant∙es féministes de Montpellier. Ce jeudi 14 janvier, le calme habituel régnant devant le tribunal correctionnel était perturbé par quelques 150 personnes criant et applaudissant. Et pour cause, se tenait cet après-midi le procès de l’automobiliste qui avait, le 30 août dernier, percuté volontairement quatre colleuses du collectif CQFAD+. Trois d’entre elles avaient du être hospitalisées. Après un premier report du procès, il a été reconnu coupable de violences aggravées et a écopé d’une peine de 4 ans et demi de prison ferme.

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Un rassemblement en soutien aux victimes

Alors que l’audience ne commençait qu’à 14 heures, les personnes venues soutenir les trois colleuses présentes pour le procès étaient déjà nombreuses dès 13 heures devant le tribunal judiciaire de Montpellier. Après de courtes prises de paroles et de chaleureux remerciements envers les personnes présentes, les militant∙es ont répété, en version française et espagnole, la célèbre performance sud-américaine Un violador en tu camino , « un violeur sur ton chemin ».

« Et le violeur c’est toi. C’est la police. C’est la justice. C’est l’Etat. La Société. L’Etat oppresseur est un macho violeur. »

Une danse pour dénoncer la complicité des institutions étatiques, policières et judiciaires dans les violences sexistes et sexuelles lors d’un procès à la portée  « presque politique » selon les mots de l’avocate des militantes, en voilà un symbole fort. Mais dans les cris et les chants, on pouvait aussi sentir la raison d’être de ces groupes de collage : un besoin de se faire entendre et une solidarité à toute épreuve.

« Aujourd’hui c’est un procès comme il y en a tous les jours, mais beaucoup de violences sont outragées ou banalisées. Qu’il s’agisse de violences sexistes, conjugales, sexuelles, pédocriminelles, homophobes, transphobes, et j’en passe malheureusement ; elles sont toutes le résultat du patriarcat qui gangrène notre société. Alors je ne vais pas m’éterniser, je vais juste dire quelques mots qui me semblent essentiels. Prônons la bienveillance entre nous. Soyons inclusif∙ves envers les minorités. Luttons aux côtés de nos camarades qui subissent des oppressions systémiques et aimons-nous.

Convergeons nos luttes et unissons-nous, on en a réellement besoin. Et puis malgré les personnes qui ne veulent pas de nous, on ne lâchera pas, on continuera à exister uni∙es et on continuera à militer pour nos droits, notre liberté et notre paix. » – Solenne, victime

Si la majorité des 150 personnes présentes pour le rassemblement s’est dissipée en début d’après-midi, une trentaine d’entre elles est bel et bien restée devant le tribunal pendant toute la durée de l’audience, bravant le vent et le froid. « Vous n’imaginez pas à quel point c’est important pour tout le monde, y compris pour nous, les avocats », les a remercié Maitre Anne Bouillon, l’avocate des quatre colleuses.

Le caractère sexiste de l’agression reconnu

Le procureur requérait 4 ans de prison, et c’est de 6 mois de plus que le prévenu a écopé. Il s’agit ainsi d’une sentence proche de la peine maximale pour les chefs d’inculpations de violences aggravées. Ce dernier, avec un casier judiciaire comprenant une dizaine de mentions, comparaissait déjà détenu dans le cadre d’une autre affaire jugée récemment. Suite à son interpellation relative à l’agression des colleuses, il avait entre temps été placé sous contrôle judiciaire par le juge des libertés et de la détention.

Pour Maitre Bouillon, la victoire est presque totale. « Nous avons obtenu tout ce que nous voulions obtenir, y compris des dommages et intérêts pour les quatre victimes ». Trois circonstances aggravantes ont également été retenues : violences avec préméditation, avec arme par destination – la voiture -, et commises en raison du sexe, de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre des victimes.

C’est de ce dernier point que se félicitent particulièrement les militantes. « C’était ce qui nous importait, qu’on reconnaisse que c’était parce que nous sommes des femmes, ou en tout cas perçues comme femmes, que nous avons été victimes d’agression », explique Thaïs, l’une des victimes.

Pas de reconnaissance de ses actes par l’auteur

Une déception persiste pourtant. « Il a refusé de reconnaître ce qu’il a fait, raconte Thaïs. Il a tout nié du début à la fin. » Entre interruptions des plaidoiries et remarques déplacées à l’attention des victimes, ces dernières déplorent n’avoir perçu aucune remise en question de la part du prévenu. Une attitude qui a pu jouer en sa défaveur, alors que les preuves l’incriminant étaient nombreuses. Traces du choc sur la voiture, géolocalisation du téléphone sur les lieux de l’agression, images vidéo du tram’ ont conclu à la culpabilité de l’agresseur. Celui-ci pourtant, devrait faire appel de la décision.

Plus que de violences envers les femmes, il est aussi ici question de violences envers les féministes, « un sujet dont on parle peu », explique Solène, membre du CQFAD+. « Des attaques nous en subissons régulièrement, et c’est parfois violent, mais elles ne nous arrêteront pas dans notre combat ».







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