Des militant∙es LGBTQI+ bravent les éléments et la Manif Pour Tous à Nîmes

Sous un ciel gris et une pluie battante, l’Esplanade Charles-de Gaulle est bien triste ce samedi après-midi. Devant les Arènes de Nîmes, la Manif Pour Tous se rassemble autour d’un bébé géant orné de symboles “€” pour protester contre le projet de loi bioéthique qui prévoit – entre autres – l’ouverture de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes. Tout près d’eux, des membres locaux du groupe identitaire de la Ligue du Midi s’agitent, comme des chiens prêts à mordre celleux qui oseraient trop s’approcher. À l’autre bout de la place, les Patriotes du parti de Florian Philippot, sont aussi de sortie contre la « coronafolie ». Et puis, au milieu de toute cette noirceur, une éclaircie.

Ielles sont de Nîmes et Montpellier et ielles sont courageuxses. Armé∙es de discours et de drapeaux colorés, une quarantaine de militant∙es LGBTQI+ sont là, au milieu de l’Esplanade avec un objectif : se montrer. « Ce qu’on veut c’est être visible, explique Justine*, une de ces militant∙es. La Manif Pour Tous est là pour enterrer nos droits, mais on ne va pas se laisser faire. On est là. On existe. Et ça, ils ne pourront jamais nous l’enlever ». Ce week-end du 30 janvier marquait un appel national à la mobilisation de la Manif Pour Tous. Plus de 60 rassemblements avaient lieu dans toute la France, et presque autant de contre-manifs. À Nîmes, ce n’est pas à un seul groupe que les contre-manifestant∙es ont dû faire face, mais bien à trois. Sans compter les forces de l’ordre, pas vraiment ravies de les voir arriver.

Un climat de tension permanent

Quelques minutes seulement après le déploiement des banderoles, les policiers viennent prendre la température. Ou plutôt la donner. « Ne les provoquez pas, disent-ils, on ne pourra pas les retenir ». Ils reviendront plusieurs fois, jusqu’à demander aux militant∙es queer de s’en aller. Pas vraiment suffisant pour faire flancher la détermination de ces dernier∙ères. Les drapeaux multicolores répondent à ceux nationalistes, les embrassades et les danses aux menaces et aux gestes obscènes. Les slogans antifascistes fusent.

Les manifestant∙es sont bientôt rejointes par les antifas de la manifestation contre la loi sécurité globale qui s’était terminée non loin de là, et l’Esplanade prend des airs de guerre des tranchées. Les deux camps se font face et se provoquent, tout en restant à bonne distance. Les militant∙es queer, resté∙es en retrait, essaient de calmer le jeu. Et la Manif Pour Tous n’est pas en reste. « Une de leur manifestante est venue tourner autour de nous, alors qu’un policier venait de nous dire de baisser le son, rapporte Jules*. Comme par hasard, juste après qu’elle soit partie, il y a eu une grosse détonation derrière nous ».

Sitôt les manifestant∙es de la sécurité globale parti∙es, les militant∙es LGBT+ reprennent leur place. Aligné∙es, se tenant la main, ils forment une grande ligne colorée. Toustes ensemble, ils forment de leur corps, de leur présence dans cet espace, comme une muraille, un rempart a la haine et à l’intolérance. « On vous aime », crient-ielles. La crainte de débordements a laissé la place à une solidarité qui semble à toute épreuve. Les chants et les danses reprennent. La manifestation redevient plus joviale. Une joie teintée d’inquiétude, certes, mais une joie quand même.

« On recommencera s’il le faut »

Malgré la déception de certain∙es des manifestant∙es queer qui auraient préféré que l’événement soit « plus festif et moins dans l’agressivité et la violence », le bilan de la mobilisation reste positif. « On a resserré les liens qu’on avait commencé à nouer entre les militant∙es de nos deux villes », assurent-ielles. Une bonne chose puisque ces dernier∙ères seront certainement amené∙es à se revoir.

« Tant que la Manif Pour Tous sera là, tant que des personnes voudront nous empêcher d’avoir des droits, nous serons dans la rue aussi ».

Alors, courage. Quand l’Obscurantisme et la Haine paradent fièrement, agitant des drapeaux et hurlant des slogans dont la violence n’a d’égale que la bêtise de celleux qui les profèrent ; courage. Quand les droits humains sont bafoués au nom de principes moyenâgeux, courage. Quand le rejet des autres, de l’Autre, devient une fierté et un objectif à atteindre, courage. « Ielles sont déterminé∙es, nous le sommes encore plus. »

*Les prénoms ont été modifiés.







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