Le Multivers de la haine raciale

Pourquoi le “multivers” de la haine raciale ? La notion de multivers illustre ces différents mondes peuplés de ce qui serait la preuve tangible de la décadence politique. Ces excitants mondes se composent de dialectiques replètes de sous-entendus, d’alliances implicites et d’apologies déguisées. La haine raciale que nous évoquons, est par conséquence, le produit d’une agonie raciale latente, réprimée, et qui se distille “goutte à goutte”, à travers ces mondes politiques, construits sur l’espace public.

L’incitation à la haine raciale est le fait, par des discours, des écrits ou par tout autre moyen, de pousser des tiers à manifester de la haine, de la violence ou de la discrimination à l’encontre de certaines personnes, en raison de leur religion, de leur origine nationale ou ethnique.

Actuellement, enquêter sur les personnages politiques et les idéologies auparavant attribuées à l’extrême droite devient une tâche très épuisante. Entre ambitions, brassages et récupérations de la droite macronienne à l’extrême droite. Entre républicains hypocrites, fallacieux, qui soutiennent les groupuscules d’extrême droite, socialistes attachés à une nouvelle laïcité islamophobe, voici le spectre partisan fantasmagorique qui rêve d’une “migration contrôlée” compatible aux lois du marché et qui  sabote au pas d’un grand-adagio toutes conventions des droits humains.

C’est à travers de la propagande partisane ou militante, que le consentement se forge. La propagande “intensive” qui se déploie dans le monde médiatique vise à déshumaniser et radicaliser la pensée.

La propagande a deux visages ; un manipulateur et un autre révélateur. Et c’est dans le multivers des réseaux sociaux que tout se passe. Une fois extrait le “summum” de cette propagande manipulatrice (qui apparaît et est digérée dans son sens le plus primaire), ceci révèle une autre réalité plus sombre, et faite de raccourcis idéologiques et de liaisons entre personnages d’univers politiquement éloignés. Des questions émergent. Pourquoi, ces personnages politiques nourrissent et s’appuient sur les mêmes idéologies et apologies haineuses glanées auprès du lectorat d’extrême droite ?

 

Dans ce monde politico-médiatique où semi-vérités, fakenews, idées trompeuses, amalgames, émergent des hautes classes politiques puis finissent dans la vox populi qui les banalise, une posture psychologique forte est nécessaire pour gérer et démystifier la haine sociale, le racisme systémique et le repli identitaire qui se déploie constamment sur l’espace médiatique. Cette novlangue est bien construite et volatile. Sous le discours de l’identité culturelle et de la sécurité nationale se cache une haine raciale insupportable, dénoncée “diplomatiquement” par des institutions internationales.

 

Ce suprémacisme blanc, dénoncé par l’ONU, existe et s’exprime dans plusieurs domaines. Cependant, la plupart des fois il est invisibilisé, derrière des tendances culturelles et ethnographiques. Ce suprémacisme se traduit dans des concepts comme le “bon patriotisme”, l’orientation de débats politiques, et dans des comportements omniprésents et “acceptés” dans notre société, bien qu’inacceptables. En général, c’est une fois qu’il se concentre sur une cible qu’il est véritablement démasqué et vérifiable juridiquement.

Le discours de haine n’a pas de définition précise en termes de droits humains. Selon le Comité des ministres du Conseil de l’Europe, il couvre toute forme d’expression qui répand ou justifie la haine raciale, la xénophobie, l’antisémitisme ou toute forme de haine basée sur l’intolérance, y incite ou en fait l’apologie (Conseil de l’Europe, 2020). Si les cibles de la haine sont diverses (Cohen-Almagor, 2011), la majorité des cadres réglementaires proposés par des instances telles que l’Union européenne ou les États européens désignent un ensemble spécifique de « catégories » que l’on appelle souvent « protégées » (Droin, 2018). Ce sont notamment des groupes sélectionnés en raison de leurs caractéristiques propres – notamment « raciales », « ethniques », religieuses, de genre –, considérées (à tort ou à raison) comme immuables.

Génération identitaire – la dernière mascotte de la fachosphère.

Environ un mois après l’opération anti-migrants à la frontière franco-espagnole dans les Pyrénées, menée par le groupuscule d’extrême-droite Génération Identitaire, le groupe est visé par une procédure de dissolution. Gérald Darmanin se voit coincé entre ses ambitions politiques (ramasser des votes à l’extrême droite) et une “obligée” enquête préliminaire pour « provocation publique à la haine raciale ». Après l’avoir vu défendre l’Action Française sur les plateaux de télé, beaucoup se sont interrogés sur les vraies intentions du ministre avec cette procédure.

«  L’Action française est une association dont chacun connaît le fait qu’elle veut remplacer la République par la royauté. C’est la grandeur de la démocratie et de la République d’accepter que des gens veulent remplacer son régime ! »

Le mercredi 3 mars, pour la joie des mécréants, G.I. fut dissoute. Mais l’odyssée continue, et G.I. dépose un recours devant le Conseil d’État. Car toute une autre bataille se joue ; celle du droit à la haine, du droit au nationalisme, du droit au suprémacisme blanc.

Revenons au samedi 20 février 2021. Génération Identitaire se rassemble à Paris en réaction à la menace de sa dissolution. Un événement néo-fasciste banal, mais qui devient extraordinaire lorsque, sur place ou sur les réseaux sociaux, un alignement phénoménal de personnalités politiques expriment leur plein soutien au groupuscule d’extrême droite.

Président du parti VIA, Il entend se présenter à l’élection présidentielle de 2022 en tant que « candidat conservateur ».

Dans l’aveuglement, les qualificatifs « pacifiste », « non-violent », « victime de la répression d’État », « patriotes désespérés », débouchent dans l’espace médiatique. Très peu de médias saisissent le taureau par les cornes, et mettent les militants face à leurs délits. À la place, le débat se perd dans la sémantique politique, l’aveuglement émotionnel, l’atteinte à la démocratie.

Des violences et des condamnations bien réelles.

L’association en elle-même n’a pas fait l’objet de condamnation jusqu’ici. Mais certains de ses membres ne peuvent pas en dire autant. Par exemple, dix-neuf d’entre eux ont été condamnés à des amendes pour avoir déployé une banderole hostile à la politique du gouvernement sur le toit du siège du Parti socialiste en 2013.

En 2016, trois personnes de l’association ont été condamnées à des peines de prison ferme à la suite d’altercations avec des membres des forces de l’ordre au cours d’une manifestation illégale à Calais, relatait La Voix du Nord.

Deux cadres de Rebeyne, l’antenne lyonnaise de Génération identitaire, ont été condamnés pour des agressions au couteau qui avaient été commises en 2014 à l’issue d’un procès suivi par Rue 89 Lyon en 2018. Ces faits n’ont pas de lien avec une opération organisée par l’association.

Plusieurs autres affaires impliquant des membres du mouvement d’extrême droite, listées par Libération, seront prochainement étudiées par la justice. Par exemple, pour l’irruption de membres de l’association dans les locaux de SOS Méditerranée à Marseille en 2018, 22 militants seront jugés en correctionnelle, pour « violences volontaires » et « séquestration », rapportait La Provence à la fin janvier.

À la précédente liste, se rajoute le documentaire d’Al Jazeera :Generation Hate ” de 2018 (à retrouver ici et ici), une infiltration qui démontre le caractère violent, nationaliste et néo-nazi de Génération Identitaire, donc pourquoi insister dans un mensonge ?

André Bercoff (suivi par Clément Weill-Raynal), très connu sur SudRadio, média qui se radicalise depuis 2000 à droite, voire à l’extrême-droite, publie un tweet à l’image de son idole américain, Donald Trump. Une fakenews, un mensonge, avec pour finalité le BUZZ. Il s’agit là d’une stratégie de l’extrême-droite, connue et référencée par différents médias dont le marseillais CQFD et son article « Depuis le nord, Sud Radio émet vers l’extrême droite » (via Acrimed).

Après le buzz, vient le débunkage, mais celui-ci se révèle tardif et irrévérencieux, car le mal est déjà fait. Induire la discorde, la contre-information, la désinformation, générer de la sympathie, sacraliser le nationalisme à coup d’émotions… C’est le travail de notables personnages extrémistes comme André Bercoff. Le complotiste et islamophobe est prêt à tout incarner pour défendre sa “caste”, et c’est là où tout se joue. C’est là que son compte, avec plus de 115 000 abonnés, fait la différence.

Entre tous ces personnages que l’envie a pris d’exprimer leur soutien à G.I, on peut citer Jean-Marc Morandini, Thierry Mariani, Michel Onfray, Benjamin Cauchy, Philippe de Villiers, Marion Maréchal et Robert Ménard. Lors du rassemblement de soutien, se trouvent sur place Maxime Brunerie (un terroriste, auteur d’une tentative d’assassinat sur le président de la République française Jacques Chirac), Jean Messiha, Florian Philippot et Jean-Yves Le Gallou, ancien dirigeant du FN, qui, en 2012, lança l’Observatoire des journalistes et de l’information médiatique (plateforme encore active). Unpersonnage-clé de l’extrême droite française, une sorte “d’intellectuel organique” qui appartient à la mouvance identitaire et “ethno-différentialiste” (axée sur la défense de la race blanche).”.

Pendant que le hashtag #generationidentitaire touche plus de 3 millions de personnes, en seulement quelques heures, la colosse du fascisme français, Marine Le Pen, choisit plutôt le silence. Pas de pub, pas de tweet de soutien ce jour-là. Plutôt exhiber son dernier communiqué : “Lancement du programme SNLE 3G, une étape clé pour garantir la dissuasion nucléaire française”.

Pour info : Le SNLE 3G est un Sous-Marin Nucléaire Lanceur d’Engin de troisième génération, dont le prix de construction approche les 7 milliards sans l’armement. Il sera équipé de missiles nucléaires M51, dont le coût à l’unité avoisine les 120 millions d’euros.

Il est extrêmement important de comprendre que tous ces personnages liés à l’extrême droite, sont des expert.e.s des réseaux sociaux. La grande partie de leur vie politique se concentre sur la propagande sur la toile et dans des médias comme LCI, Europe1, Cnews, FranceSoir, TVL, etc. Une propagande qui rapporte, car dans ce monde “virtuel moderne”, il n’y a pas de barrières morales ou éthiques, seulement de l’opinion.

Cette forme de militantisme est nécessaire pour de petites formations qui ne comprennent que quelques centaines de militants : le web permet une démultiplication du militantisme. La faiblesse numérique est ainsi remplacée par un sur-activisme virtuel qui permet également à tous ceux qui refusent le jeu électoral de s’insérer dans un véritable combat culturel initié à l’extrême droite par la Nouvelle Droite dans les années 1970.

Dans ce cyber-monde de la ré-information, « Défendre la France contre l’invasion » n’est pas une incitation à la haine raciale. « Protéger la nation de l’Islam » n’est pas une incitation à la haine religieuse. Une honte pour la République ? Une victoire pour l’extrémisme ?

Une apologie qui s’appuie sur un racisme décomplexé.

Ils sont les “puppets” de l’extrême droite. Eric Zemmour, Élisabeth Lévy, Zineb El Rhazoui ou Jean Messiha, entre beaucoup d’autres, exaltent de surprenantes xénophobie et ethnophobie, selon eux justifiée. Si leurs mots n’ont aucune valeur, et leur verbiage parait inoffensif, la ré-information est leur “objectif primordial”. Dans le monde médiatique de la désinformation, ils sont les “virulents pourfendeurs de l’immigration”, les grands racistes et haineux, qui appellent à “tirer à balles réelles” sur les délinquants de banlieue parisienne. Comment l’expliquer ?

Cette xénophobie médiatique d’extrême droite est surréaliste, mais aussi spectaculaire. Ces personnages, qui semblent être munis d’une spontanéité incroyable, touchante, sont en fait des acteurs expérimentés. D’un côté ils vont taper sur les migrants, les arabes, les musulmans, et les associer “en permanence” aux dépenses de l’État, aux crimes, viols, assassinats, invasions, fanatismes, etc. De l’autre côté, ils ciblent aussi les “français de souche” laxistes, mous, collabos, racistes anti-blancs, complices ou islamo-gauchistes. Un discours solide, récurrent, qui vise d’abord à détruire leur adversaire idéologique, puis à renforcer le pouvoir de la classe sociale à laquelle ils appartiennent.

C’est extrêmement important de comprendre que l’extrême droite et évidemment le Rassemblement National défendent bec et ongle le libéralisme politique. Le “populisme” des partis d’extrême droite ressemble à l’idéologie des anciennes monarchies : respect à la nation, culte au roi, à la personnalité, au prestige, peur de l’ennemi, repli identitaire, impérialisme, etc.

Curieusement, l’extrême droite emporte des votes chez le français travailleur, qui paye ses impôts, qui a des enfants et qui galère pour subvenir à ses besoins. C’est chez ces personnes fragilisées, qui grondent, que l’extrême droite théorise l’émancipation sociale et induit la pensée nationaliste.

À quel moment, la glorification de la démocratie ou de la république implique-t-elle le comportement raciste ou xénophobe ? Dans cette rhétorique visant à prendre des exceptions pour des généralités, ou réduire la complexité de la question à des expériences personnelles, le but est de réveiller l’apathie de celles et ceux qui en ont le plus besoin. À coup de désinformation, on finit par entendre les “anciens immigrés” parler des “nouveaux immigrés” comme “des parasites qui viennent ici pour vampiriser la France” et ” ne font même pas l’effort de s’adapter”.

La France, au-delà du déni socio-politique, semble une série de traumas intergénérationnels, issue de 500 ans d’impérialisme et de colonialisme. Mais si on recule un peu dans le temps : qui sont les “Français”, sinon un mélange d’ethnies qui ont cohabité sur le continent européen depuis des milliers d’années ? Les migrations ont toujours existé, et les mélanges ethniques également : Gaule romaine, puis barbare, migrations intra-européennes.

L’idée suprémaciste de “français de souche” ou le concept de “nationalisme” apprécié par les identitaires, ne concerne que les “hautes classes” qui ont dominé la France ces derniers siècles. La “base”, le peuple français est multiethnique, multiraciale, polyglotte, etc.

Pour illustrer par un autre exemple, aux États-Unis, les conséquences psychosociales du colonialisme façonnent toujours l’actualité. Le génocide des “indigenous americans, n’a jamais été reconnu. Aujourd’hui les dits “américains de souche”, présentent un mix entre des natifs d’Amérique, des Européens caucasiens (parmi eux des Français, Anglais, Allemands etc.), des “Afro-américains” issus de plusieurs pays d’Afrique, des peuples asiatiques, etc. Pourtant beaucoup veulent, pour protéger la nation, construire des murs, fermer les frontières, réduire les territoires des réserves et expulser les Mexicains, les arabes, etc. Un suprémacisme blanc terrifiant autant qu’ignoble, douloureux héritage de 500 ans d’éducation raciale.

La république a déjà échoué, et les politiques menées par la majorité des couleurs partisanes au pouvoir, veulent détruire le peu qu’il en reste. Des multi-racismes inter-sociétaux prolifèrent par des personnages comme Zemmour ou Messiha, car leurs paroles racistes, décomplexées déchirent les bases les plus nobles de l’idée républicaine. Ces extrémistes ne donnent aucune valeur réelle à la “liberté d’expression”, ils l’utilisent contre la démocratie.

Au grand étonnement de nombreux Français, LREM fait aussi une descente vers les enfers de l’extrême droite. Dans ce nouveau monde proclamé par les identitaires et les nationalistes – « la France aux Français » – la Macronie se distingue à peine. LREM, préfère plutôt “habilement” distiller les idées de l’extrême droite, les arranger, les adapter à son programme.

Sur le plan international, Macron garde son cap. Ce monde mathématique libéral, à l’image de Milton Friedman ou Margaret Thatcher, le fascisme en fait partie. La violence n’est pas liée à la délégation du pouvoir aux entreprises, au privé, mais à la réaction du peuple à la “modernisation” de la structure sociale. Les politiciens de LREM s’opposent à l’enfermement, la sortie de l’Union européenne ou à la réduction des importations. Ils parlent d’une Europe unie par la puissance du marché. Puisque la France est la sixième puissance mondiale, pourquoi s’en préoccuper ? Marine Le Pen doit se calmer, la France défendra ses intérêts.

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Pour la Macronie, se montrer ouvertement nationaliste, anti-migrations ou raciste, s’avère être un comportement irrationnel, primitif et complétement dépassé. Macron préfère refuser l’entrée des bateaux de sauvetage comme SOS Méditerranée, investir dans Frontex, durcir les lois du droit d’asile, de l’aide médicale d’État, etc. Les mêmes rêves et mesures proclamées par le RN, mais sans la terreur de la radicalité ou de la vielle tâche pourrie de la haine raciale ordinaire. Une manœuvre coercitive indirecte qui, d’un côté, met facilement à genoux la communauté internationale, et de l’autre, ouvre les portes aux électeurs de la droite dure.

Dans ses préconisations, l’ODF insiste sur le nécessaire renforcement de la mixité sociale afin de lutter contre les replis identitaires. Il insiste également sur la clarification et le renforcement du statut des aumôniers musulmans en prison et à l’hôpital.

Sur le plan national, après la volonté de fermeture de l’Observatoire de la laïcité, le gouvernement met en place une série de lois dont le RN pourrait rêver. À la loi séparatisme qui arrive à banaliser le discours islamophobe (derrière les valeurs de la république), s’ajoute la loi sécurité globale. La haine raciale macronienne rejette l’évidence et se cache derrière le non-dit. Elle n’attaque pas directement les musulmans, mais leurs lieux de culte, leur façon de s’habiller, ce qu’ils mangent… Aussi se précise l’image d’un racisme dont la cible devient l’identité culturelle ou religieuse.







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